Alfred Fronval, un des pilotes les plus exceptionnels de son temps

Au début du XXème siècle, la France est en pointe dans la course à la conquête de l’air. C’est la naissance des premières lignes commerciales aériennes, l’âge d’or de constructeurs ingénieux, Farman, Nieuport, Voisin, Morane Saulnier. Des noms d’aviateurs, nombreux à être passés à la postérité, nous reviennent en mémoire : Louis Blériot, Jean Mermoz, Antoine de Saint-Exupéry. Alfred Fronval* était l’un de ces « chevaliers à la monture d’acier », qui firent rêver les plus jeunes comme les plus âgés, icones d’une époque où ils incarnaient l’esprit d’aventure, la liberté et l’audace. 

Après trois ans de combat dans les tranchées et une croix de guerre obtenue en avril 1917 « pour sa belle conduite au cours des opérations de Verdun », Alfred Fronval est détaché à l’école d’aviation du Crotoy, en tant qu’élève pilote. A partir de 1917, les besoins pour la jeune armée de l’air sont en effet tels que le recrutement s’en trouve modifié. L’aviation devient alors une forme de promotion pour les meilleurs soldats en grande partie issus de l’infanterie. Fronval obtient son brevet en juillet 1917 sur Caudron G3, et se fait remarquer par son habileté et son « audace raisonnée ». 

Après un passage de quelques mois à Pau, au centre d’entrainement de la chasse, il rejoint une escadrille de combat en mars 1918. Puis il retourne à Pau contre son gré, à la demande du commandement, pour former les pilotes dont l’aviation française avait tant besoin. Le sergent Fronval excelle dans ce rôle d’instructeur, où « par la constance de ses efforts, il a contribué à faire de pilotes médiocres des exécutants pleins de volonté et de confiance ».

Démobilisé en avril 1919, il rencontre Robert Morane, propriétaire du constructeur aéronautique Morane-Saulnier, qui lui offrira une place de pilote d’essais à Villacoublay au sein de sa firme. Il y partagera son temps entre le pilotage des nouveaux appareils et la formation des pilotes. Comme beaucoup des anciens as de la première guerre, il participe dans les années 20 aux nombreux meetings aériens qui se multiplient et établit plusieurs records. Peu à peu il se forge une renommée dans le milieu de la voltige aérienne, dont il devient une des références européennes, volant sur Morane Saulnier.

Avec deux autres français, Jean-Baptiste Salis et Charles Robin, anciens pilotes de chasse, il crée en 1927 une des première patrouilles d’acrobatie aérienne au monde, « la patrouille tricolore », lointain ancêtre de la patrouille de France.

Il meurt dans un accident en 1928 à bord d’un Breguet XIV à l’âge de 35 ans, laissant derrière lui une femme et deux fillettes. Ce jour-là disparaissait « un des pilotes les plus exceptionnels de son temps » selon Michel Detroyat, as de la voltige aérienne des années 30, qui fit sa connaissance chez le constructeur Morane Saulnier. Jacques Mortane, écrivain et journaliste spécialiste du monde aérien de cette époque dira de Fronval « qu’il rendait jaloux même les oiseaux ».

Alfred Fronval est enterré dans le cimetière de Viroflay. Au-delà d’un grand nombre de records et de victoire dans des courses aériennes, il restera aussi comme l’inventeur d’un simulateur de vol.

* Dans l’ouvrage « L’Aronde & le kayak. Une famille à Viroflay 1930 – 1960 », de Jean-Pierre Naugrette, publié par les éditions les deux Sœurs, l’auteur consacre un chapitre aux aviateurs du début du 20e siècle qui firent la renommée de l’aérodrome de Villacoublay, tout proche, dont Alfred Fronval.

Sources :

L’Aronde et le kayak. Une famille à Viroflay 1930 – 1960, Jean-Pierre Naugrette, Editions les deux Soeurs, 2019

L’homme qui rendait jaloux les oiseaux, Alain Chevalier, 2015

Les sports aériens : de la compétition sportive à la violence de guerre, Luc Robène, Presses Universitaires de France

Le destin médiatique des chevaliers du ciel, François Pernot