Le commando Kieffer: les 177 français du jour J (2)

Le 23 Mars 1942, la compagnie d’instruction du commandant Kieffer, qui comprend alors vingt-neuf hommes, prend enfin le nom de compagnie de fusiliers marins français, à la sortie du cours des Royal Marines d’Eastney. C’est l’acte de naissance du premier commando français.

Le baptême du feu a lieu en Août 1942 : un officier et quatorze hommes participent au raid alliés sur les plages de Dieppe. Le second maître Louis-Serge Moutailler perdra la vie dans l’opération. Il est le premier commando français tué en opération. Il avait vingt-quatre ans.

Le reste de l’année 1942 et la première moitié de 1943 sont relativement calmes pour le commando français, qui enchaine les entrainements et les stages de formation dans les camps de l’armée britanniques. Cette inaction pèse cependant sur les hommes, impatients d’affronter les Allemands. Plusieurs des recrues de Kieffer, décideront de quitter le commando et de rejoindre des unités combattantes de la France Libre basée en Afrique du Nord.

Cependant, grâce à un inlassable travail de persuasion, à la fois des hommes qu’il cherche à recruter et de sa hiérarchie militaire, Kieffer parvient à structurer et à faire croître son unité, qui comptera 172 fusiliers marins dont 13 officiers à la fin de l’année 1943. Le timing est parfait, car le temps de l’action et enfin arrivé. Les commandos français sont appelés à participer à une série de raids de renseignements sur les côtes françaises, néerlandaises et sur les îles anglo-normandes. Ces opérations sont d’une grande importance pour le commandement allié. Il s’agit à la fois de maintenir l’ennemi dans l’illusion d’un débarquement dans le Pas de Calais et de glaner des renseignements topographiques en vue du véritable débarquement prévu en Normandie.

Puis les choses s’accélèrent. En mars 1944, tous les hommes de Kiefer sont envoyés au Nord Est de l’Ecosse à Nairn pour un exercice de débarquement, en vue de préparer l’opération Overlord. En avril, les français rejoignent le commando n°4 du colonel Robert Dawson, au sein de la 1ère brigade spéciale de commandos de Lord Lovat, et s’installent à Bexhill-on-Sea, dans le Sud de l’Angleterre, où ils poursuivent leur entrainement intensif jusqu’au 20 mai 1944. Le 25 mai, les 600 hommes du commando n°4, parmi eux tous les bérets verts français, rejoignent un camp américain situé près de Southampton.

Lors de leur premier briefing, plusieurs des commandos français issus du Havre reconnaissent sur les cartes et les photographies muettes, la région dans laquelle doit se dérouler l’opération. Ils ont ordre de conserver ce secret pour eux. La troupe française reçoit la mission de débarquer la première sur la plage de Colleville-sur-Orne. Leur objectif est de prendre le casino de Ouistreham transformé en forteresse par l’armée allemande, puis de faire la jonction avec la 6ème division aéroportée parachutée la veille à une dizaine de kilomètres à l’intérieur des terres.

Le 5 juin vers midi tous les 177 commandos français du commandant Kieffer quittent le camp et sont conduits, comme les 2000 autres commandos de leur brigade, dans le port de Warshah entre Portsmouth et Southampton. Le 6 Juin 1944, ils entrent en scène et débarquent sur la plage de Ouistreham dans un déluge de balles traçantes et d’obus.